vendredi 6 février 2009

La Grosse feignasse termine enfin sa bafouille

(la fin)

Comme j’ai plein de temps à perdre, Madame la Ministre, j’aime bien lire, sur Internet, qu’on est « la secte à six mois de vacances » ; j’aime bien me voir confirmer que je suis une vraie feignasse, au cas où je viendrais à en douter (ça m’arrive, parfois). C’est vrai que c’est cool, la vie universitaire : rentrée mi-septembre, fin des cours mi-avril, avec des semaines d’interruption entre les deux semestres. Sauf qu’en janvier et en mai, ce ne sont pas les vacances, mais les examens. Surveillances (j’en profite pour me vernir les ongles des pieds), corrections (le stylo rouge à lèvres dans la main). Relectures de mémoires (dans le bain, c’est pas grave). Soutenances (avec deux enseignants, pour qu’on puisse faire la sieste chacun son tour pendant que les étudiants causent). Ensuite, les jurys se réunissent fin juin (pour réfléchir ensemble à la couleur de nos maillots de bain). Et ensuite encore, il faut préparer l’année suivante : refaire les livrets, parfois les maquettes, faire passer des entretiens en M2 pro (en tongs et paréo).
Je passe donc mes journées à ne rien faire, ou presque.

J’oubliais un petit détail, Madame la Ministre : mon statut officiel, c’est « enseignant-chercheur ». Donc entre les cours, les copies, les soutenances et les réunions, il faut quand même que j’arrive à pondre quelques articles ou, encore mieux, des bouquins. Que j’aille à des colloques, ou que j’en organise. Que je participe à des projets de recherche, si possible que j’en monte. Que je trouve des financements. Que je constitue des dossiers. C’est rude, pour une feignasse comme moi. D’ailleurs, pour l’instant, je n’y arrive pas vraiment, parce que je suis trop occupée à ne rien faire (sauf entretenir mon hypertrichose).
Heureusement, votre gouvernement veille à tirer de temps en temps les feignasses de leur léthargie, à secouer le cocotier géant qui pousse dans nos mains. Autonomie des universités, réforme des concours, réforme des statuts… Budget en baisse, masters à réorganiser de fond en comble en deux mois, pour un concours dont votre collègue ne sait pas à quoi il ressemblera, service d’enseignement qui - à salaire égal - pourra aller jusqu’à 384 heures… Moi qui ne savais plus comment remplir mes journées (mon hypertrichose en a quand même pris un coup), me voici rassurée. Mais je me demande quand même si, juste par esprit de contradiction, je ne vais pas me mettre en grève : au moins, ça m’occupera, moi qui ne fais rien. Rien de rien.

Au plaisir, Madame la Ministre, pour le jour où vous voudrez rejoindre le club des Grosses Feignasses. Je n'ai pas trop le courage de saluer et tout le tralala, je me contente donc de signer:


La Grosse Feignasse

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